jeudi 12 juin 2008

Grand'peur et misère du IIIe Reich et La presse

Sadreddin Zahed et sa troupe
Le courrier de l'ouest

Le Journal de Maine-et-Loir
N° 87

Mercredi 12 Avril 1995

Anne-Laure Gandon
" Grand'peur et misère "
d'hier et d'aujourd'hui

Le théâtre D-Nué a choisi une pièce difficile pour concourir aux Arlequins : " Grand'peur et misère du IIIe Reich " de Bertold Brecht, qui dès 1935, avait compris la logique meurtrière du régime nazi. Délation, camps de concentration, marches militaires : les maîtres mots du IIIe Reich naissant se retrouvent dans les scènes de Brecht.
Le visage peint pour le rendre universel, les comédiens se sont visiblement totalement investis dans leurs rôles, n'hésitant pas à terminer le spectacle nus (symbole des déportés se dirigeant vers les chambres à gaz?). Le décor uniquement constitué d'un four crématoire, suggère tout, sans jamais rien montrer, car le narrateur, rare dans le théâtre contemporain, se charge de restituer l'action.
Le spectacle avait de quoi dérouter par sa dureté et sa noirceur. Il a malgré tout conquis le public, qui l'a longuement applaudi.

Anne-Laure Gandon, Anna-Maria Gorostiza, Mattieu Bellon, François Pilon, Natacha Leriche
Ouest-France

N° 15336
Jeudi 13 Avril 1995

Cinq troupes pour trois trophées

Le rideau est tombé sur le premier acte du festival des Arlequins.

Le jury de sélection a désigné les cinq troupes finalistes.

F. Pilon, A. Gorostiza
Théâtre D-Nué (Paris) : " Grand'peur et misère du IIIe Reich "
Vendredi à 15h

La troupe n'est pas une inconnue du festival. C'est son remarquable travail sur une pièce de Brecht qui lui vaut cette année son accession en finale. Le règlement du festival limite la durée des spectacles à cinquante minutes. La troupe l'a bien compris. L'oeuvre de Brecht ici adaptée, analyse et dénonce la montée du nazisme en Allemagne dans les années trente. La mise en scène ne donne pas dans le superflu. Le plateau est vide, à l'exception d'un four crématoire vers lequel les comédiens se dirigeront, dépouillés de tout à la scène finale. Un grand travail sur les éclairages, une musique en direct sur la scène et, surtout une grande rigueur dans le jeu ont conduit ce spectacle en finale. Traiter un tel sujet avec tant d'efficacité n'allait pas de soi.

Jean-Luc ROTUREAU

F. Pilon, A. Gorostiza, N. Leriche
Festigazette

Les Arlequins cholet

Vendredi 14 Avril 1995

Edito : Les feux du drame
Le soleil noir enfin brilla de tous ses feux. Le Théâtre D-Nué nous a réconcilié avec le drame et a vaincu la mort. Intrigué, agacé, silencieux, subjugué, vibrant, le public a été convaincu. La montée en puissance de leur sobre machinerie a été un grand moment de théâtre.

Le Festigazier

M. Bellon, N. Leriche, A. Gorostiza, A. Gandon, B. Minot, F. Pilon
THÉÂTRE SANS INTERDIT

Les moeurs évoluent selon les siècles. Les modes d'expression aussi. Le cinéma s'est depuis longtemps libéré de tout interdit. Plus de tabous, ou presque. Le théâtre lui aussi remue, change, ose... C'est ce que l'on peut constater dans "Grand'peur et misère du IIIe Reich" ; pièce au sujet fort, au sujet troublant : la peur, la misère, le nazisme...

Nous entendons ici des mots durs et troublants : la mort, les camps, le commencement d'un génocide, la montée en puissance d'un dictateur sont évoqués ouvertement. Nous entrons dans un monde froid où règne le plus fort.

Le décor, la musique et la mise en scène : tout participe à cette impression de précarité. Les mots sont forts et un narrateur lisant les didascalies renforce le ton d'une scène. Malgré la diversité des situations, nous pouvons ressentir une continuité par des motifs récurrents : la danse, la marche militaire...

Les acteurs ne nous cachent rien, les changements de costumes ont lieu sur scène. Ils iront même jusqu'à proclamer leur refus, nus sur scène.

Choquant, provocateur? Peut-être que certains penseront oui. Mais d'autres déjà, ne peuvent retenir à la fermeture du rideau une vive exclamation : " C'est beau ".

Sophie VERROEST

Sadreddin Zahed et sa troupe
Les cinq pièces sélectionnées pour la finale
Ouest-France (samedi 15 - dimanche 16 - lundi 17 Avril 1995)

Après quatre jours et seize pièces, le jury des Arlequins a rendu hier soir son verdict. Cinq pièces iront donc en finale : "ça déménage" de la Compagnie Frédérick Lemaître(Pierrefitte), "Les ventriloques", de la troupe "La folle avoine"(Wattignies), "Le ruban blanc", de la troupe de théâtre les cabotins, qui comme, le théâtre de onze heures onze, sélectionné pour "Commedia Dell'Molière", est québecoise, et "Grand'peur et misère du IIIe Reich", du Théâtre D-Nué(Paris).

Les cinq pièces finalistes seront rejouées vendredi et samedi. Trois d'entre elles se verront décerner les Arlequins de bronze, d'argent et d'or.

Répétition au théâtre Renaudie(Aubervilliers)

Ouest-France

Mardi 18 avril 1995

Le Festival des Arlequins à Cholet fait triompher la francophonie

Le neuvième festival des Arlequins s'est terminé samedi soir : Les deux autres pièces de la sélection finale ont également été très appréciées du public choletais. Il s'agit de "ça déménage", une création collective et de "Grand'peur et misère du IIIe Reich", pièce de Bertold Brecht interprétée par la troupe parisienne " Le Théâtre D-Nué ".

" La qualité des cinq pièces sélectionnées me fait penser que les autres étaient drôlement bien ", soulignait Geneviéve Page, présidente du jury du gala final.

Chair de poule

Le comédien Jacques Rosny n'a pas oublié de féliciter les autres troupes. Celles qui, finalistes, n'ont pas eu la chance de décrocher un arlequin : "Au théâtre, il n'y a pas de bonheur quand il y a des exclus". Ces deux troupes sont la compagnie Fréderick Lemaître "ça déménage", et Le Théâtre D-Nué pour son interprétation de " Grand'peur et misère du IIIe Reich ", une pièce de Bertold Brecht.

Beaucoup de spectateurs ont d'ailleurs été surpris que Le Théâtre D-Nué n'ait pas figuré dans la liste des trois lauréats. La force du texte, l'originalité de l'interprétation ont beaucoup impressionné les Choletais. " Moi, j'en ai encore la chair de poule. C'était mon coup de coeur ", confiait un habitué du festival. En coulisses, Sadreddin Zahed, metteur en scène, ne pouvait retenir ses larmes. Le théâtre est parfois un art cruel.

Michel CAILLARD


Le Courrier de l'oues

Mardi 18 avril 1995

Pourquoi Brecht n'a pas eu d'Arlequin

Certains spectateurs se sont étonnés de ne pas voir au palmarès "Grand'peur et misère du IIIe Reich" de Brecht, adapté par les Parisiens du " Théâtre D-Nué ".

Le fait d'avoir choisi une adaptation a, dès le départ, quelque peu "handicapé" la troupe. Il suffit de regarder le palmarès - deux créations aux deux premières places - pour s'en convaincre. "Je pense qu'il est plus difficile de faire une création que de prendre un classique". Assure Jacques Rosny.

Mais la raison essentielle de cette déconvenue ne réside pas là, selon le vice-président du jury. " La pièce originale a été déviée, elle est plus multiple. Elle dresse le tableau des responsabilités de la montée du nazisme. Et d'où viennent elles ces responsabilités? Elle viennent de tous. Brecht, il en veut aux braves bourgeois. C'est montré avec férocité mais aussi avec humour. L'adaptation qu'on a vue est trop orientée sur l'abominable image des camps de concentration. Le public a été ému mais nous on vient pour juger de l'ensemble d'un travail ".

La scène finale, où les acteurs sont nus? " J'ai trouvé cela époustouflant. L'image est bouleversante ", répond Jacques Rosny. A la décharge de la troupe, rappelons qu'elle a dû réduire à 50 minutes une pièce qui dure quelques deux heures et demie.



Le courrier de l'ouest

vendredi 21 avril 1995

Lors du gala final du Festival des Arlequins 95, l'opticien mutualiste de Cholet a organisé un jeu destiné au public dont le but consistait à désigner par vote les troupes lauréales qui se verraient attribuer respectivement les arlequins d'or, d'argent et de bronze. Le résultat du vote du public (différent de celui du jury officiel)se répartit ainsi.

Parmi 454 voix exprimées : 119 voix pour "Grand'peur et misère du IIIe Reich"; 102 voix pour " ça déménage"; 88 voix pour "Le ruban blanc"; 73 voix pour "Les ventriloques".


Anna-Maria Gorostiza, Blandine Minot

Le courrier de l'ouest

Vendredi 12 mai 1995

Au menu de notre chronique "En direct" cette semaine, une réflexion de la troupe parieienne du "Théâtre D-Nué", qui participa brillamment au dernier festival de théâtre de Cholet, mais qui chuta au dernier acte.

On se souvient que lors du gala final du Festival des Arlequins de Cholet, certains spectateurs s'étaient étonnés de ne pas voir au palmarès " Grand'peur et misère du IIIe Reich " de Brecht, adapté par les comédiens parisiens du "Théâtre D-Nué".

Jacque Rosny, vice-président du jury final des Arlequins 95, nous répondait alors : " je pense qu'il est plus difficile de faire une création que de prendre un classique (...) L'adaptation qu'on a vue est trop orientée sur l'abominable image des camps de concentration. Le public a été ému, mais nous on vient pour juger de l'ensemble d'un travail ". " quant à la scène finale, où tous les acteurs sont nus, j'ai trouvé cela époustouflant. L'image est bouleversante... " ( c.o. du 18 avril dernier).

Réflexion - réaction du " Théâtre D-Nué " : " Nous avons été très heureux de participer au Festival des Arlequins de Cholet; et nous acceptions la décision du Jury, puisque nous savions que le but du jeu était précisément d'être jugé par ce jury. Cependant puisqu'une question a été soulevée à notre sujet, dans le " Courrier de l'Ouest " du 18 avril dernier, nous apportons nous aussi notre point de vue aux étonnant arguments que le jury met en avantpour justifier son choix.

1) - N'importe quel connaisseur de théâtre sait que la difficulté pour réussir une pièce ne réside pas le choix d'une création ou d'un classique - si tant est que notre spectacle ait été perçu comme un classique! - mais dans le fait d'arriver à construire ce fil invisiblequi reliela scène à la salle, afin qu'une réelle communication s'établisse entre les comédiens et les spectateurs.

2) - La pièce de Brecht n'a pas été " déviée ". Nous avons privilégié un angle de vue. Nous ne pensions pas que le jury était là pour juger de l'oeuvre de Brecht en son entier mais de la réussite - ou de l'échec - d'une orientation volontaire dans un temps limité de 50 minutes... En effet avec seulement 6 scène jouées des 24 scènes de " Grand'peur et misère du IIIe Reiche ", le but du " Théâtre D-Nué " était justement de souligner " cette abominable image des camps de concentration ", d'où le choix du décor constitué d'un four crématoire installé au centre de la scène du début jusqu'à la fin. L'objectif de notre troupe était bel et bien d'interpeller les spectateurs sur la triste actualité de ce cauchmar... Pour notre part nous avons reçu notre récompense par le succès remporté au près du public de Cholet, par les félicitations des autres troups concurrentes et les articles parus dans la presse. " Le public a été ému " reconnaît le vice-président du jury, mais pauvre public qui ne sait pas juger, heureusement que le jury est là pour l'éduquer! "

Sarcastique aussi le "Théâtre D-Nué".

Ouest - France, 4 mai 1992

" En coupant les parasites, les gestes sont plus forts. "


Théâtre D-Nué
Cet animal étrange
Le prix de la Francophonie


Une équipe d'apprentis comédiens


" On avait jamais entendu parler de Cholet avant de venir participer au festival des Arlequins. L'accueil a été très sympa." Pour les onze comédiens du théâtre D-Nué, Cholet représente une étape importante. C'est la première fois qu'ils jouent en province. Auparavant, ils ne s'étaient produit que sur des scène parisiennes. Vendredi, lors de la première journée de sélection, ils ont présenté "Cet animal étrange" de Gabriel Arout, inspiré de nouvelles de Tchekhov.


Le rideau s'ouvre, pas de décor. Tous les acteurs sont assis au fond de la scène. Sur le côté gauche, deux musiciens. Costumes, musique : nous sommes en Perse. A droite, un personnage va intervenir tout au long de la pièce. Les acteurs viennent à tour de rôle jouer ce qu'il raconte. Lui, c'est le conteur. Grâce à la fluidité de la mise en scène, l'enchaînement des scènes, le mouvement des acteurs, le texte s'avale à grosses lampées. Un texte pourtant, à priori, difficile à digérer : histoire d'hommes et de femmes, de vies et de morts.


" J'ai essayé de mettre le texte en valeur avec un regard différent ", explique Sadreddin Zahed, le metteur en scène d'origine iranienne. Un regard qui s'inspire du théâtre perse mêlé au répertoire occidental. Mais "cet animal étrange" est un assemblage de nouvelles créées pour le théâtre de boulevard.

" C'est pour cela que j'ai crée le rôle du conteur, sorte de fil conducteur. A partir des indications scéniques, on a ajouté des récits de Tchekhov."


Tout repose ensuite sur le jeu des acteurs. l'harmonie et la coordination de leurs mouvements. Car pour Sadreddin Zahed, " il faut réduire les accessoires au minimum. Supprimer les tapis rouges, les couleurs, le décor. Ils alourdissent le sens vrai du théâtre. En coupant les parasites, les gestes sont plus forts ".


Formation scientifique

Du théâtre en complet dénuement, d'où le nom de la troupe. Troupe créée sous forme d'association l'année dernière " dans le but de faire une recherche, formation scientifique basée sur le théâtre occidental et la culture Perse. Monter des spectacles n'est pas notre vocation première ", précise le metteur en scène. "Nous répétons six jours par semaine, de 17h à 23h. En dehors, chacun se débrouille pour trouver des petit boulots. Il faut bien vivre. " Reste à souhaiter à ces troubadours du théâtre d'être sélectionnés pour le gala final.

" Cet animal étrange " et la presse


l'Humanité
samedi 25 mai 1991




Théâtre en bref




Tchekhov repensé, transposé par un Iranien : Sadreddin Zahed, maître en théâtrologie à Téhéran, qui a travaillé depuis avec entre autre Peter Brook, Andy Degroat, a repris dans l'approche de sa culture d'origine ("comment peut-on être Persan?"), comme sur la place publique en son pays, mais pour nous de par ici, le significatif montage de scènes supérieurement articulées tirées du théâtre de Tchékhov par Gabriel Arout il y a une vingtaine d'années. Jubilatoire et insolite. A déguster les yeux ouverts en pleine confiance.


(Théâtre de la Cité Universitaire Internationale)


L'humanité, Samedi 25 mai 1991

Le figaro
Mercredi 22 mai 1991


Trois fois rien
" Cet animal étrange " à la Galerie. Sadreddin Zahed, disciple de Brook, a cherché à imiter le maître dans sa forme de théâtre : un ratage. Des comédiens tout jeunes et presque tous mauvais, une mise en scène sans invention réelle, sans originalité, sans rythme aussi : le texte léger, charmant, cruel du merveilleux Gabriel Arout sombre dramatiquement.
Jean-Luc JEENER

Mutualité
mardi 28 mai

Sadreddin ZAHED est iranien. C'est un homme de théâtre passionné, intensement créateur. Il s'est emparé de la fameuse pièce de Gabriel AROUT, sans cesse reprise, qui réunit plusieurs scènes du théâtre de TCHEKHOV.
Dans la meilleur tradition du théâtre Persan, il fait intervenir d'emblée un conteur sur la place publique qui annonce les personnages déjà familiers de TCHEKHOV. On rencontre ainsi en situation renouvelée à la fois aux couleurs Russes, Françaises - et Perses, l'homme et la femme d'avant-hier et de toujours aux prises avec leurs défauts, mais aussi leurs élans - brisés? - Leurs courts moments de joie.
Roger MARIA